13/01/2012
Plainte de MEMORIAL devant la Cour Européenne des droits de l’Homme
Un recours sera déposé devant la cour de Strasbourg par un participant au meeting de protestation sur le boulevard Tchistoprudny
Le Centre de défense des droits de l’homme Mémorial a préparé et déposera dans les prochains jours devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme un recours pour détention illégale et sans fondement d’Igor Goukovski, collaborateur de Mémorial, membre du mouvement « Solidarnost » . Goukovski a été l’un des organisateurs du meeting de protestation convoqué par le mouvement Solidarnost contre la falsification des élections à la Douma d’Etat qui a eu lieu le 5 décembre 2011 sur le boulevard Tchistoprudny à Moscou.
La demande d’autorisation a été déposée plus de dix jours avant le meeting. Le nombre de participants prévu était de 300 personnes. Pourtant le 5 décembre plusieurs milliers de personnes se sont rassemblées sur le boulevard Tchistoprudny. A la fin du meeting Igor Goukovski a été arrêté et déféré le lendemain devant le tribunal Basmanny. Au début, il a été condamné à une amende pour dépassement du nombre prévu de participants, puis la même juge Gulnaz AlekseevnaTourianskaia l’a condamné à 15 jours de détention administrative pour un prétendu « manquement aux injonctions légales des policiers ». Ensuite un juge du même tribunal Arthur Guennadievitch Karpov a rejeté l’appel interjeté contre cette décision.
D’après le juge du tribunal Basmanny, Igor Goukovski « a été informé de l’interdiction de dépasser le nombre de participants au meeting » et aurait dû immédiatement « prendre des mesures pour diminuer ce nombre à hauteur du chiffre prévu ».
Le fait que beaucoup plus de citoyens aient décidé de venir au meeting résulte de la politique du pouvoir et non de l’action des organisateurs du meeting.
Aux rassemblements organisés par le pouvoir, où les organisateurs envoient des évaluations par arrondissements et amènent les gens en autocars des différentes villes, on peut être sûr qu’il ne viendra pas plus de monde. Dans les cas où les gens viennent de leur propre gré, il est impossible de prévoir le nombre exact de participants.
Du point de vue de MEMORIAL, la décision du tribunal Basmanny d’infliger une amende et de placer en détention Igor Goukovski est absurde et constitue un manquement au droit.
Premièrement il y a eu à l’égard de Goukovski violation de l’article 11 (liberté de réunion) de la Convention Européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales. La Cour européenne a dans ses arrêts maintes fois indiqué que, même lorsque la réunion se tenait sans information préalable de l’administration, il ne devait pas être fait usage de mesures répressives, à condition qu’au cours de la réunion publique, il n’y ait pas eu de violence. Le meeting sur le boulevard s’est déroulé pacifiquement, sans menacer la sécurité des participants. Le tribunal a rejeté sans fondement la requête du défenseur Serge Davidis auprès du gouvernement de Moscou de fixer le chiffre limite d’occupation du territoire pour un meeting.
Deuxièmement Igor Goukovski a en fait été puni deux fois pour un seul et même acte. A cet égard nous sommes en présence d’une violation manifeste tant des règles de la législation russe que de l’article 4 du Protocole n°7 de la Convention européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales qui interdit de sanctionner deux fois un seul et même acte.
Troisièmement les demandes des collaborateurs de la police de diminuer le nombre des personnes déjà rassemblées pour le meeting étaient insensées et irréalisables, même si elles avaient été réellement présentées à Goukovski au cours du meeting. A l’évidence il n’avait aucune possibilité de diminuer les nombre des manifestants.
Quatrièmement, en réalité les policiers n’ont pas formulé de demandes aussi absurdes et n’ont pas empêché les arrivants d’exercer leurs droits constitutionnels. Cela est apparu en toute clarté au cours de l’examen en appel du recours du défenseur d’Igor Goukovski, lorsqu’on a recherché les enregistrements vidéo des discussions des collaborateurs de la police avec les organisateurs du meeting. Mais le tribunal ignorait simplement ce fait et a « entériné » la décision du juge de paix sur la « faute » de Goukovski consistant à « ne pas exécuter les demandes légales des collaborateurs de la police ».
Manifestement, cette décision avait pour but de faire peur aux militants, et tout aussi manifestement les juges de Basmanny n’ont pas atteint ce but.
Nous considérons que les poursuites engagées contre Igor Goukovski ont une motivation politique.
Nous sommes déterminés à prouver que les autorités de notre pays ont sérieusement violé les dispositions de la Convention Européenne des droits de l’homme et des libertés fondamentales, à obtenir d’elles une compensation équitable et à mettre un terme à la pratique illégale consistant à poursuivre les organisateurs et les participants à des actions pacifiques de protestation contre l’arbitraire et l’illégalité.
CENTRE DES DROITS DE L’HOMME MEMORIAL
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